2015-2019
Programme de recherche en design
Le design recouvre un champ d’action pluriel, il touche aussi bien aux environnements urbains, aux objets peuplant les espaces domestiques et publics, qu’à ce qui se joue entre eux. Une segmentation du design en spécialités diverses « design d’espaces », « design d’objets », « design de services », etc., ne va pas sans poser problème et tend à sous-estimer les relations existant entre ces différents champs d’activité. Aussi, la singularité de l’enseignement du design à l’isdaT tient au fait qu’il y soit pensé avant tout comme un état d’être au monde, comme une attitude, nourrie de la prise en compte des milieux, des environnements, de la ville.
Une autre caractéristique de l’enseignement du design tel qu’il est pensé à l’isdaT réside dans la perspective critique adoptée à l’encontre de certaines manières de penser et de pratiquer le design largement répandues aujourd’hui : cette critique porte sur un design entièrement subordonné à des intérêts économiques, un design au service d’une organisation productiviste et marchande.
Le design tel qu’il s’enseigne à l’isdaT cherchera d’autres orientations, il veillera à faire primer les intérêts humains sur la recherche du profit et de l’avantage concurrentiel, à prendre soin des hommes et de ce qui les environne. Par un soin accordé aux qualités sensibles des objets produits, le design peut être à même de rendre l’homme plus conscient, vif et alerte quant aux mondes qui l’entourent. « Il n’y a pas de conscience politique aveugle » disait le cinéaste Jean-Marie Straub.
Ici des enjeux politiques — être plus lucide sur ce qui nous entoure, être au fait des spécificités de notre époque et pouvoir ainsi en parler — rencontrent des enjeux esthétiques. Cette rencontre invite à considérer ensemble « idéaux » politiques et questions liées aux formes des objets.
Afin de questionner le rapport d’un design non subordonné à des intérêts économiques, et au service d’une organisation productiviste et marchande, le programme de recherche s’est articulé sur 3 volets :
Responsable du projet : Philippe Grégoire
L’architecture et le design, en tant que disciplines inscrivant le souci de l’espace entre nous au cœur de leurs réflexions, ne peuvent pas ne pas être touchées par une misère aux formes variées, qui touche une part considérable de nos semblables. Ces disciplines sont parfois réclamées pour faire face aux situations d’urgence, pour améliorer temporairement les conditions de vie de personnes en transit ou sans logis. Dans quelle mesure une situation de pénurie dans les moyens nous amène-t-elle à repenser nos façons d’habiter l’espace (sachant qu’habiter ne se résume ni à être quelque part, ni à avoir un logement) ? Comment les designers et les architectes peuvent se décentrer de leurs positions de « répondant » pour développer d’autres modes de construction et de fabrication ? Comment construire et ménager des espaces avec peu ? Comment faire du rebut une ressource ?
Responsables du projet : Nathalie Bruyère et Laetitia Giorgino, avec Jean-Marc Evezard
Partenaires : Science Animation, Chambre des métiers
À partir de réflexions sur la différence entre le travail et l’emploi le volet « Travailler pour nous » met l’accent sur les pratiques laborieuses développées en marge du monde professionnel et qui, si elles ne génèrent pas de profit immédiat, n’en demeurent pas moins d’importantes sources de richesse et de créativité. En se basant sur diverses situations de manque (considérées comme des opportunités pour envisager d’autres manières de se loger, se chauffer, s’alimenter, s’approvisionner, etc.), il s’agissait de penser la façon dont architectes et designers peuvent concevoir des équipements permettant de vivre avec peu, de réduire les consommations d’énergie, de produire, voire de stocker et de diffuser ces énergies ou encore de penser et faire des objets réparables au lieu de contribuer à la production d’objets en plus conduisant à une accumulation nuisible.
Responsables du projet : Laetitia Giorgino et Hanika Perez
Partenaires : La Chouette Coop
L’émergence de supermarchés coopératifs ces dernières années apparaît comme le signe d’une remise en question des modèles dominants de la grande distribution et d’un « fournir sans fin ». Souvent laissé à la charge des ingénieurs, l’allure des espaces d’approvisionnement n’aura été que peu traitée par les architectes et les designers. Or, la modification du fonctionnement appelle une mise en forme particulière de ces espaces, mise en forme qui participerait d’un rapport à la consommation plus raisonné.
Peut-on penser des espaces de commerce offrant la possibilité de comprendre les produits en présence et leurs modes de production ? Y aurait-il des manières de concevoir ces espaces qui ouvriraient à un rapport aux biens plus réfléchi, là où les commerces contemporains privilégient le réflexe d’achat ?
Telles sont les questions qui animent cette recherche en design qui porte sur la fabrique responsable d’un espace d’approvisionnement et interroge les manières de rendre lisibles et visibles les conditions de culture et d’acheminement des produits.
Pendant l’année 2017-2018, cet atelier d’initiation à la recherche a été proposé aux étudiants de 4e année en design. De novembre 2017 à fin janvier 2018, l’atelier a pris la forme d’une observation participative. Les étudiants participants sont devenus membres coopérateurs de la chouette coop.
Cette année, le projet autour du supermarché se déploie sur deux volets. Il s’inscrit, d’une part, dans un atelier de recherche et d’expérimentation (séance hebdomadaire), associant des enseignants et des étudiants de l’option design (studio design et environnement) et de l’option design graphique. Les étudiants développent des pistes de recherche et des scénarios de projet, pour un design civique qui travaillerait à la visibilité, la transmission d’information et de savoir dans le contexte d’un supermarché coopératif.
D’autre part, ce projet fait l’objet d’un partenariat avec le master DTCT de l’Université Toulouse — Jean Jaurès. Il est ponctué de différents étapes :